Depuis le mois de décembre 2023, Julien MARTIN Avocat intervient auprès des autorités et juridictions françaises, dans l’objectif d’obtenir un visa pour des parents de ressortissants français bloqués dans la bande de Gaza. Le cabinet saisit l’occasion de rappeler les circonstances particulières de ces affaires, au regard de la situation humanitaire et du contexte de violations répétées et constantes du droit international et des Droits de l’Homme à Gaza.
Le 07 octobre 2023, le Hamas a lancé une attaque contre le territoire d’Israël depuis la Bande de Gaza, causant la mort de plus de 1.200 civils israéliens et la prise d’otage de plus de 240 civils. En riposte, Israël a lancé une contre-offensive et a imposé un siège sur le territoire de la Bande de Gaza. Depuis lors, le conflit se poursuit par des frappes de grande ampleur sur le territoire de la Bande de Gaza et une offensive terrestre de l’armée israélienne à compter du 27 octobre 2023 se traduisant par des combats urbains, à l’exception de la période de la trêve conclue entre le 22 novembre et le 1er décembre 2023.
En décembre 2023, Madame S.A, âgée de 70 ans et souffrant d’un handicap aux genoux, a quitté le nord de Gaza avec sa famille. Madame S.A est parvenue à rejoindre le centre-ville de Rafah. Depuis plus de 10 mois, les bombardements font rage dans le sud de Gaza et plus aucune place ne permet de garantir la sécurité de la population civile, mais également des personnels humanitaires. Madame S.A se trouvait donc dans une situation d’extrême vulnérabilité, compte tenu de la situation humanitaire catastrophique qui sévit actuellement à Gaza.
Par deux courriers en date des 07 et 13 décembre 2023, Maître Julien MARTIN a sollicité, respectivement auprès du Consulat Général de France au Caire et du Ministère des Affaires Étrangères, la délivrance d’un visa humanitaire permettant à Madame S.A de rejoindre son fils, Monsieur S.A, en France. Courant janvier 2024, a pris attache auprès de la Cellule de Crise du Consulat de France à Jérusalem pour soutenir cette demande, en vain, et malgré plusieurs relances.
Au fil des mois, la situation de Madame S.A s’est dégradée. Celle-ci a souffert de malnutrition et de maladies de la peau dues au manque d’accès à une eau saine. Elle a été contrainte de fuir le nord de Gaza en raison des violences armées qui y sont perpétrées, et s’est retrouvée dans l’impossibilité de retourner à son domicile, sa maison ayant été détruite lors des bombardements.
Ce n’est qu’à partir du 10 avril 2024, que Madame S.A a pu quitter la Bande de Gaza pour rejoindre le Caire en Égypte, où elle demeurait toutefois dans une situation de particulière vulnérabilité, puisqu’elle n’avait pas vocation à être prise en charge par les autorités égyptiennes.
C’est pourquoi, Maître Julien MARTIN a, une nouvelle fois, sollicité la délivrance d’un visa d’entrée en France auprès du Consulat Général de France au Caire, mais cette requête est également restée sans réponse de la part des autorités consulaires françaises.
Maître Julien MARTIN a alors saisi le Tribunal administratif de Nantes d’une requête en « référé liberté » sur le fondement de l’article L. 521-2 du Code de justice administrative. Il a notamment invoqué l’existence d’une situation d’urgence pour la requérante, en raison du risque pour celle-ci de subir des traitements inhumains ou dégradants et des menaces graves contre sa vie ou sa personne, notamment en raison des violences armées et des bombardements intenses et des tirs contre les populations civiles qui sévissent dans la Bande de Gaza.
Il a notamment rappelé un arrêt du 12 février 2024 (n° 22054816), par lequel la Cour nationale du droit d’asile (CNDA) a jugé que « au regard tant du conflit en cours que de la situation humanitaire, la situation actuelle dans la Bande de Gaza doit être regardée, à la date de la présente décision, comme une situation de violence aveugle d’intensité exceptionnelle résultant d’une situation de conflit entre les forces du Hamas et les forces armées israéliennes, au sens du 3° de l’article L. 512-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ». La CNDA a ajouté que : « M. A., qui doit être regardé comme un civil, courrait en cas de retour dans son pays et plus précisément dans la Bande de Gaza, du seul fait de sa présence, un risque réel de subir une menace grave et individuelle contre sa vie ou sa personne en raison d’une situation de violence qui peut s’étendre à des personnes sans considération de leur situation personnelle et résultant d’une situation de conflit armé. Dès lors, M. A. est fondé à se voir accorder le bénéfice de la protection subsidiaire ».
Maître Julien MARTIN a enfin invoqué la violation des articles 3 (interdiction des traitements inhumains ou dégradants) et 8 (droit au respect de la vie privée et familiale) de la Convention européenne des droits de l’homme pour soutenir l’existence d’une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale à l’égard de Mme S.A.
En effet, Dans un communiqué de presse en date du 19 février 2024, des experts de l’ONU « [Traduction non officielle] ont exprimé aujourd’hui leur inquiétude face aux allégations crédibles de violations flagrantes des droits de l’homme dont les femmes et les filles palestiniennes continuent d’être victimes dans la bande de Gaza et en Cisjordanie. (…) Selon les informations reçues, des femmes et des filles palestiniennes auraient été exécutées arbitrairement à Gaza, souvent avec des membres de leur famille, y compris leurs enfants. (…) Les experts ont exprimé leur vive inquiétude face à la détention arbitraire de centaines de femmes et de jeunes filles palestiniennes, notamment des défenseurs des droits de l’homme, des journalistes et des travailleurs humanitaires, à Gaza et en Cisjordanie depuis le 7 octobre. Nombre d’entre elles auraient été soumises à des traitements inhumains et dégradants, privées de serviettes hygiéniques, de nourriture et de médicaments, et sévèrement battues. À une occasion au moins, des femmes palestiniennes détenues à Gaza auraient été enfermées dans une cage sous la pluie et dans le froid, sans nourriture »[1].
Enfin, l’organisation non gouvernementale « Human Right Watch », dans un rapport intitulé « No One is Spared – Abuses Against Older People in Armed Conflict » publié le 23 février 2022 a décrit les violations récurrentes des droits des personnes âgées lors d’un conflit armé. Ce rapport expliquait que « [Traduction non officielle] En mai 2021, alors que des efforts discriminatoires sont déployés pour forcer les Palestiniens à quitter leurs maisons à Jérusalem-Est occupée, 11 jours d’hostilités ont éclaté entre le gouvernement israélien et les groupes armés palestiniens à Gaza et en Israël. Le 16 mai, une série de frappes aériennes israéliennes a tué 44 civils et en aurait blessé 50, après l’effondrement de trois bâtiments. L’armée israélienne a déclaré qu’elle visait des tunnels et un centre de commandement souterrain utilisés par les groupes armés, mais n’a fourni aucun détail à l’appui de cette affirmation. Parmi les personnes tuées se trouvaient des personnes âgées de 63 à 93 ans (…) »[1]. Ce rapport ajoutait que « [Traduction non officielle] Human Rights Watch a documenté des cas dans lesquels les forces gouvernementales ont soumis des personnes âgées à de graves abus, notamment en les battant et en leur donnant des coups de pied, en les suspendant dans des positions de stress, en leur brisant les os et en les privant de traitement médical, de nourriture et d’eau pendant leur détention. Dans certains cas, ce traitement s’apparentait à de la torture et entraînait parfois la mort »[2]. Ce rapport précisait également que « [Traduction non officielle] Des groupes armés ont enlevé et séquestré des personnes âgées, notamment lors d’attaques ciblées contre des chefs de communautés »[3] et que « [Traduction non officielle] Human Rights Watch a documenté la destruction et le pillage des biens des civils pendant les conflits armés, qu’il s’agisse de leurs meubles, de leurs économies, de leurs maisons ou de leurs entreprises. Les personnes âgées ont décrit la dévastation que représente la perte de tout ce pour quoi elles ont travaillé toute leur vie, ainsi que la perte de membres de leur famille et de leurs moyens de subsistance. Le pillage et la destruction des maisons et des biens peuvent avoir un effet accru sur les personnes âgées qui peuvent avoir été déplacées plus d’une fois, être séparées du reste de leur famille, et qui peuvent trouver plus difficile de reconstruire leur vie que les personnes plus jeunes »[4].
L’organisation non gouvernementale « Human Right Watch », dans un article intitulé « Israël et Palestine – Évènements de 2023 » a indiqué que peu après les évènements du 07 octobre 2023, « les autorités israéliennes ont coupé les services essentiels, dont l’eau et l’électricité, à la population de Gaza et bloqué l’entrée de toute marchandise à l’exception d’un mince filet de carburant et d’aide humanitaire cruciale (…). Des frappes aériennes israéliennes se sont abattues sur Gaza de manière incessante, touchant des écoles et des hôpitaux et réduisant de vastes secteurs de certains quartiers à des tas de décombres, y compris lors d’attaques qui étaient apparemment illégales. Les forces israéliennes ont aussi illégalement utilisé des munitions au phosphore blanc dans des zones densément peuplées. Elles ont ordonné l’évacuation de tous les habitants du nord de Gaza et, au 11 décembre, avaient fait déplacer environ 85 % percent de la population du territoire — 1,9 million de personnes. Plus de 18.700 Palestiniens, pour la plupart des civils, dont plus de 7.800 enfants, ont été tués entre le 7 octobre 2023 et le 12 décembre 2023, selon les autorités de Gaza »[1].
Ce rapport relevait que « Les frappes aériennes israéliennes et le bouclage du territoire ont contraint la majorité des hôpitaux à cesser de fonctionner. Les pénuries d’électricité et de carburant ont forcé les usines de traitement des eaux usées et de désalinisation, ainsi que les boulangeries, à fermer et ont contribué à des pannes de télécommunications. Le manque d’eau a créé une crise de santé publique. Quoique des camions transportant de l’aide aient commencé à entrer à Gaza le 21 octobre 2023, et que d’autres aient suivi lors d’un cessez-le- feu de plusieurs jours qui a débuté le 24 novembre 2023, cette aide était insuffisante par rapport aux besoins de la population de Gaza. L’ordre donné par Israël d’évacuer le nord de Gaza n’a pas pris en compte les besoins des personnes âgées, des personnes handicapées et des malades, dont beaucoup n’ont pas la capacité de partir. Cette mesure risque d’aboutir à des déplacements de force, ce qui est un crime de guerre »[2].
L’organisation non gouvernementale, « Amnesty international », dans un article publié le 15 février 2024 et intitulé « Rafah, Ultime refuge et nouveau cimetière des familles gazaouies » a indiqué que « Dans le cadre de nos investigations, nous n’avons trouvé aucun élément indiquant que les immeubles d’habitation touchés pouvaient être considérés comme des objectifs militaires légitimes ni que les personnes se trouvant à l’intérieur étaient des cibles militaires. Ce constat laisse craindre que ces frappes constituent des attaques directes contre des civils ou des biens de caractère civil. Si tel est le cas, elles devront faire l’objet d’enquêtes en tant que crimes de guerre »[3]. Cet article ajoute que « Ces attaques n’ont à l’évidence pas fait de distinction entre objectifs militaires et biens de caractère civil : elles auraient donc été menées sans discrimination. Or, ce type d’attaques qui tuent et blessent des civil·e·s constituent des crimes de guerre. De plus, il semblerait que l’armée israélienne n’a pas averti de manière efficace, voire pas du tout, les habitant·es des sites touchés, avant de procéder aux frappes »[4].
Dans un article en date du 26 février 2024, l’ONU a indiqué que « très peu d’aide humanitaire est entrée dans la bande de Gaza assiégée ce mois-ci, avec une réduction de 50% par rapport à janvier »[5]. Cet article ajoute que l’UNRWA a déclaré que : « L’intensification des frappes aériennes à Rafah, y compris dans les zones résidentielles, sans avertissement préalable, a accru les craintes qu’elles n’entravent davantage les opérations humanitaires surchargées »[6].
Le 27 février 2024, Le Monde, dans un article intitulé « Quelle est la situation humanitaire dans la ville de Rafah ? Comprendre en trois minutes », a indiqué que « La population de Rafah a été multipliée par cinq avec l’arrivée de plus d’un million de Gazaouis déplacés par la guerre. Et la ville est aussi dans le viseur de l’armée israélienne, qui considère qu’elle abrite le dernier bastion du Hamas »[7].
L’Organisation Mondiale de la Santé (ci-après OMS), dans un rapport du 3 mars 2024, a indiqué que « [Traduction non officielle] Les hôpitaux de Rafah sont débordés et peinent à répondre aux besoins. Les activités de deux hôpitaux de Khan Younis ont été compromises : le siège de l’hôpital Al-Amal le rend peu fonctionnel, tandis que les dégâts subis par le complexe médical Nasser l’ont rendu inutilisable. Cette situation, à laquelle s’ajoute l’afflux de personnes déplacées à l’intérieur du pays qui migrent vers Rafah, met à rude épreuve la capacité du système de santé à répondre aux besoins de la population du sud en matière de soins de santé »[8]. Ce rapport a ajouté que « [Traduction non officielle] La persistance d’un niveau élevé d’insécurité, la destruction des routes et des infrastructures et le manque de facilitation des missions humanitaires continuent d’entraver l’accès aux soins de santé. Un mécanisme de déconfliction opérationnel durable est nécessaire pour faciliter les multiples missions humanitaires quotidiennes dans la bande de Gaza (…) Les taux de malnutrition augmentent. Compte tenu des niveaux extrêmes d’insécurité alimentaire et des épidémies, les efforts de dépistage opportuniste ont révélé une augmentation significative des taux de malnutrition. »[9].
L’OMS a énoncé plusieurs recommandations comme, par exemple, un «cessez-le-feu immédiat », « Élargir et maintenir l’accès humanitaire à Gaza pour le carburant, l’eau, la nourriture, les médicaments et les autres fournitures nécessaires », « Élargir les couloirs humanitaires et assurer un passage sûr pour permettre l’acheminement de l’aide humanitaire à l’intérieur de Gaza », « Protection active des civils et des soins de santé, en préservant le fonctionnement des installations sanitaires restantes »[10].
Par ailleurs, la Cour Internationale de Justice, dans son ordonnance du 26 janvier 2024, a jugé que « Israël doit, conformément aux obligations lui incombant au titre de la convention sur le génocide, prendre toutes les mesures en son pouvoir pour prévenir la commission, à l’encontre des Palestiniens de Gaza, de tout acte entrant dans le champ d’application de l’article II de la convention, en particulier les actes suivants : a) meurtre de membres du groupe, b) atteinte grave à l’intégrité physique ou mentale de membres du groupe, c) soumission intentionnelle du groupe à des conditions d’existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle, et d) mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe. La Cour rappelle que de tels actes entrent dans le champ d’application de l’article II de la convention lorsqu’ils sont commis dans l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe comme tel (…). La Cour considère également qu’Israël doit veiller, avec effet immédiat, à ce que son armée ne commette aucun des actes visés ci-dessus »[1].
La Cour Internationale de Justice a ajouté que « Israël doit prendre sans délai des mesures effectives pour permettre la fourniture des services de base et de l’aide humanitaire requis de toute urgence afin de remédier aux difficiles conditions d’existence auxquelles sont soumis les Palestiniens de la bande de Gaza »[2].
Par une ordonnance du 28 mars 2024[3], la Cour Internationale de Justice a indiqué à l’État d’Israël des mesures conservatoires additionnelles, à savoir :
- Prendre toutes les mesures nécessaires et effectives pour veiller sans délai, en étroite coopération avec l’Organisation des Nations Unies, à ce que soit assurée, sans restriction et à grande échelle, la fourniture par toutes les parties intéressées des services de base et de l’aide humanitaire requis de toute urgence, notamment la nourriture, l’eau, l’électricité, le combustible, les abris, les vêtements, les produits et installations d’hygiène et d’assainissement, ainsi que le matériel et les soins médicaux, aux Palestiniens de l’ensemble de la bande de Gaza, en particulier en accroissant la capacité et le nombre des points de passage terrestres et en maintenant ceux-ci ouverts aussi longtemps que nécessaire ;
- Veiller, avec effet immédiat, à ce que son armée ne commette pas d’actes constituant une violation de l’un quelconque des droits des Palestiniens de Gaza en tant que groupe protégé en vertu de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, y compris en empêchant, d’une quelconque façon, la livraison d’aide humanitaire requise de toute urgence ;
La Cour observe que, depuis le 26 janvier 2024, « les conditions désastreuses dans lesquelles vivent les Palestiniens de la bande de Gaza se sont … encore détériorées, en particulier au vu de la privation prolongée et généralisée de nourriture et d’autres produits de première nécessité à laquelle ceux-ci sont soumis », et que « les Palestiniens de Gaza ne sont plus seulement exposés à un risque de famine, ainsi qu’elle l’a relevé dans son ordonnance du 26 janvier 2024, mais doivent désormais faire face à une famine qui s’installe ». De l’avis de la Cour, « les mesures conservatoires indiquées dans l’ordonnance du 26 janvier 2024 ne couvrent pas intégralement les conséquences découlant des changements dans la situation …, justifiant ainsi une modification de ces mesures ».
Par une ordonnance du 24 mai 2024[4], la Cour internationale de Justice a indiqué à l’État d’Israël des mesures conservatoires additionnelles, à savoir :
- L’État d’Israël doit, conformément aux obligations lui incombant au titre de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, et au vu de la dégradation des conditions d’existence auxquels sont soumis les civils dans le gouvernorat de Rafah :
a) Par treize voix contre deux,
Arrêter immédiatement son offensive militaire, et toute autre action menée dans le gouvernorat de Rafah, qui serait susceptible de soumettre le groupe des Palestiniens de Gaza à des conditions d’existence capables d’entraîner sa destruction physique totale ou partielle ; (…)
Au regard tant du conflit en cours que de la situation humanitaire catastrophique dans la Bande de Gaza, les circonstances précitées constituent une situation de violence aveugle d’une intensité exceptionnelle résultant d’une situation de conflit, à laquelle était exposée Mme S.A, au sens de l’article L. 512-1, 3° du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.
C’est pourquoi, Maître Julien MARTIN a argué que l’inaction des autorités consulaires françaises faisait peser une atteinte grave et manifestement illégale sur Madame S.A, notamment contraire aux articles 3 et 8 de la Convention européenne des droits de l’homme.
Par une ordonnance en date du 28 mai 2024, le Juge des référés du Tribunal administratif de Nantes a toutefois rejeté la requête de Madame S.A. La Juge des référés du Tribunal Administratif de Nantes a jugé que : « (…) Il est toutefois constant que Madame S.A réside désormais en Egypte. Dans ces conditions, alors même qu’ainsi qu’elle le fait valoir, « elle n’a[urait] pas vocation à être prise en charge par les autorités égyptiennes », Madame S.A ne justifie pas d’une situation d’urgence impliquant qu’une mesure visant à sauvegarder une liberté fondamentale doive être prise dans un délai de quarante-huit heures. Il lui appartient, si elle s’y croit fondée, dans l’hypothèse où un refus de visa lui serait opposé, de contester la décision de l’autorité consulaire, y compris en saisissant le juge des référés sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative ».
Considérant que le Tribunal administratif de Nantes avait ainsi commis une erreur manifeste d’appréciation, Maître Julien MARTIN a saisi le Conseil d’État d’un recours à l’encontre de cette décision.
Il invoqua que la condition d’urgence est reconnue par la jurisprudence lorsque la décision administrative contestée préjudicie de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu’il entend défendre (Voir en ce sens : Conseil d’État, Section, 19 janvier 2001, Confédération Nationale des Radios Libres, req. n° 228815, RFDAdm. 2001, page 378, conclusions L. TOUVET).
Le cabinet Julien MARTIN – Avocat releva, en particulier, l’existence de motifs contradictoires dans les décisions rendues par les juridictions administratives françaises sur la situation de gazaouis parents de ressortissants français, dans des affaires similaires.
Ainsi, dans un arrêt du 16 janvier 2024, (n° 490691), le Conseil d’État a jugé que : « 8. Il résulte de l’ensemble des éléments rappelés aux points 6 et 7 que la requérante ne peut se prévaloir, en l’état de l’instruction et à la date de la présente ordonnance, d’une situation d’urgence à se voir délivrer des laissez-passer consulaires ou tout autre document nécessaires pour entrer en France, notamment un visa, avant d’avoir réussi à quitter la bande de Gaza. Par suite, la condition d’urgence particulière prévue par les dispositions de l’article L. 521-2 du code de justice administrative ne peut être regardée comme remplie. En raison de ces mêmes éléments, la seule absence de délivrance de ces documents ne peut en tout état de cause être regardée comme ayant été de nature à porter, par elle-même et à la date de la présente ordonnance, une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales invoquées par les requérants ». Cette jurisprudence a été reprise par le Tribunal Administratif de Paris, dans un jugement en date du 29 mars 2024 (n° 2406889).
Il découle de cet arrêt que le Conseil d’État a considéré que la condition d’urgence mentionnée à l’article L. 521-2 du Code de justice administrative n’était pas remplie tant que les personnes résidant dans la Bande de Gaza n’avait pas réussi à quitter cette région. Ce qui n’était manifestement pas le cas de Madame S.A qui avait pu rejoindre le Caire en Égypte et quitter la bande de Gaza.
Au vu des décisions précitées, la condition d’urgence étaient donc remplies pour voir délivrer à Madame S.A un laissez-passer consulaire ou tout autre document nécessaire pour entrer en France.
Finalement, et après plus de 8 mois de « combat » auprès des autorités consulaires françaises et devant les juridictions administratives, Madame S.A a pu obtenir un visa d’entrée en France pour un court séjour. Elle formera une demande d’asile et Maître Julien MARTIN s’engage à l’accompagner dans ces nouvelles démarches.
D’autres requérants gazaouis parents de ressortissants français sont malheureusement toujours bloqués dans la bande de Gaza, malgré les nombreuses diligences du cabinet pour soutenir leur demande de visa d’entrée en France, aux fins d’y solliciter la qualité de réfugié.
Maître Julien MARTIN s’engage à solliciter les juridictions internationales de protection des Droits de l’Homme contre la France, lorsque les voies de recours au niveau national seront épuisées.
[1] https://www.icj-cij.org/fr/node/203447
[2] Ibid.
[3] https://www.icj-cij.org/sites/default/files/case-related/192/192-20240328-pre-01-00-fr.pdf
[4] https://www.icj-cij.org/sites/default/files/case-related/192/192-20240524-ord-01-00-fr.pdf
[1] https://www.hrw.org/fr/world-report/2024/country-chapters/israel-and-palestine
[2] Ibid.
[3] https://www.amnesty.fr/conflits-armes-et-populations/actualites/gaza-israel-rafah-frappes-enquete-genocide- crimes-de-guerre-embargo-cessez-le-feu
[4] Ibid.
[5] https://news.un.org/fr/story/2024/02/1143497
[6] Ibid.
[7] https://www.lemonde.fr/comprendre-en-3-minutes/video/2024/02/27/quelle-est-la-situation-humanitaire-a- rafah-comprendre-en-trois- minutes_6218780_6176282.html#:~:text=La%20situation%20humanitaire%20est%20catastrophique,enfants%2 C%20selon%20l%27Unicef.
[8] https://www.emro.who.int/images/stories/Sitrep_-_issue_24.pdf?ua=1
[9] Ibid.
[10] Ibid.
[1] https://www.hrw.org/sites/default/files/media_2022/02/global_olderpeople0222_web.pdf, p.18
[2] Ibid., p. 24
[3] Ibid., p. 29
[4] Ibid., p. 30
[1] https://www.ohchr.org/en/press-releases/2024/02/israelopt-un-experts-appalled-reported-human-rights- violations-against